Enfants masqués à l’école primaire : un premier bilan inquiétant. Action & Démocratie se porte partie civile.
Lorsqu’il a décidé des mesures de reconfinement partiel, le gouvernement a choisi de laisser les écoles ouvertes. Tant mieux ! Nos élèves n’ont pas encore fini de payer le prix social et éducatif du premier confinement. L’ouverture des écoles est une nécessité impérieuse et induscutable. Mais dans les écoles, ce mois de novembre a été particulièrement morose. Pour ne parler que de la situation sanitaire, la crainte de la contamination et la lourdeur du protocole préoccupent grandement les collègues.
Comme tous, nous déplorons, les atermoiements et revirements incessants du ministère, sa communication médiatique mensongère, souvent irritante et toujours auto-satisfaite.
Comme tous, nous dénonçons le fait que cette « deuxième vague » n’ait pas été anticipée par le gouvernement, et que rien n’ait été fait en amont pour y faire face, ni dans les hôpitaux ni dans l’Education nationale.
Et comme tous, nous constatons que ce « protocole renforcé », en vigueur depuis plus de deux semaines, a été élaboré dans la précipitation et l’improvisation pour servir la communication ministérielle destinée à rassurer une opinion qui a de bonnes raisons de s’inquiéter, tant les revirements et les décisions extravagantes se multiplient. Tout se passe comme si l’on voulait donner l’impression d’agir, d’où une inflation de règles et de normes dont il est d’emblée interdit de mettre en question l’efficacité, alors qu’on a passé des années à massacrer l’hôpital au point de le rendre incapable de faire face à une situation qui devaient finir par se produire et qui se reproduira probablement à l’avenir.
Si les gains de certaines mesures spectaculaires sont très incertains en termes de santé publique, les dégâts sur nos conditions de travail et sur le bien-être de nos élèves sont, eux, très palpables. Une nouvelle fois, les équipes enseignantes sont soumises à rude épreuve, et particulièrement dans le premier degré les directeurs d’écoles, pour ne pas changer !
Dans ce contexte si confus et si compliqué, nous ne pouvons souscrire aux appels à un protocole « toujours plus renforcé » lancé par certaines organisations. Si l’épidémie de Covid19 doit être prise au sérieux et s’il est nécessaire de prendre des précautions de bon sens pour en entraver le développement, la psychose ne doit pas l’emporter sur la raison qui, contrairement à ce que prétendait non sans ironie le philosophe David Hume, ne dicte pas de préférer la destruction du monde à une égratignure de son petit-doigt ! Nos conditions de travail et l’intérêt supérieur de nos élèves doivent également peser dans la balance afin que nos décisions soient justes et utiles.
Nous avions déjà émis de sérieuses réserves en début d’année sur l’obligation professionnelle du port du masque pour les enseignants, constatant – et bien des médecins avec nous – les effets secondaires sur notre santé à court et moyen terme. Il n’y a rien de naturel à porter un masque pendant une journée entière. Et que dire des conséquences pédagogiques et psychologiques, par exemple sur des enfants de maternelle qui n’ont jamais pu voir le visage de leur maîtresse ?
Et voilà que depuis début novembre, contre l’avis de nombreux spécialistes dont celui de la Société française de pédiatrie[1], faisant fi des réserves formulées par l’OMS[2] elle-même sur le bénéfice de cette mesure, le masque est rendu obligatoire pour les élèves dès l’âge de 6 ans, y compris dans les espaces extérieurs de l’école. Trois semaines plus tard, les professeurs des écoles (comme beaucoup de parents d’élèves) sont partagés entre résignation et colère, entre les « C’est vraiment déprimant mais on n’a pas le choix … » et les « Quel spectacle que de voir aujourd’hui mes élèves de CP tenter d’apprendre à lire derrière un masque ! », « Pour les enfants en difficulté, tu parles d’un cadeau ! », « Je vois mes élèves essoufflés en récréation. » etc.
Les collègues, qui doivent gérer sur le terrain les effets de mesures décidées sur un coin de table, fût-ce celle du Conseil des ministres, constatent que beaucoup de nos jeunes élèves ont en réalité du mal à utiliser correctement leur masque : tripoté, mis sous le menton, posé n’importe où, régulièrement réajusté, échangé avec un camarade, ramassé par terre ! Dans ces conditions, le remède n’est-il pas pire que le mal ?
« Ils s’adapteront. Les enfants s’habituent à tout » assurent avec désinvolture les promoteurs du masque partout et tout le temps. C’est loin d’être certain ! En sus des risques et des contre-indications médicales, le « coût psychique » pour les enfants est largement sous-estimé comme s’en inquiètent de nombreux psychologues et spécialistes de l’enfance (notamment dans une tribune parue il y a quelques jours dans le journal Libération : « Ne cédons pas à toutes les peurs, et ne sous-estimons pas le coût de la perte de l’insouciance et de la liberté d’une qualité d’expression orale, notamment à l’âge de six ans. »)
Si ralentir la progression du virus doit se faire à n’importe quel prix, pourquoi ne pas imposer le masque dès le berceau ? Pourquoi ne pas isoler chaque citoyen dans sa cave pendant un mois ? Où est la limite ?
Ce protocole est non seulement inapplicable, mais il est néfaste pour la santé de nos enfants et préjudiciable pour leurs apprentissages. C’est la raison pour laquelle Action & Démocratie a décidé de s’associer en tant que partie civile à la plainte contre X déposée par l’association « Réaction 19 » et son avocat, Me Brusa. Cette plainte, très documentée, repose sur le concept d’intérêt supérieur de l’enfant, consacré par de nombreux traités internationaux dont la valeur est bien supérieure à celle d’un décret, et démontre que le préjudice causé à l’enfant à qui l’on impose le port du masque dès l’âge de six ans est sans commune mesure avec l’hypothétique gain en matière de santé publique d’une telle mesure. Pour prendre connaissance de cette plainte et des arguments utilisés, cliquez ici…
[1] Rapport de la Société française de pédiatrie sur la rentrée scolaire
[2] Orientations provisoires de l’OMS, 5 juin 2020