Edito

Défendre et valoriser le lycée pro

Qui pense encore aux PLP ?

Si la situation matérielle et professionnelle de tous les professeurs s’est considérablement détériorée au cours des trente dernières années, que dire de celle des professeurs du LP (Lycée Professionnel) dont le métier a été largement déprécié par les différentes réformes. Après les réformes du bac pro 3 ans, les nouvelles mesures de libéralisation de l’enseignement professionnel mettent à mal l’avenir des lycées professionnels. Le « tout apprentissage » au cœur des politiques gouvernementales tend à remettre en cause le statut des LP comme institutions nationales, et de ce fait le statut de fonctionnaire de l’Etat de ses enseignants. En outre, par la réduction du nombre d’années de formation (passage au bac pro 3 ans), du nombre d’heures d’enseignement (disparition des heures d’AP) tout en augmentant le nombre d’élèves par classe (de 24 à 30 dans les filières tertiaires), les politiques de restrictions budgétaires ont fortement dégradé les conditions d’enseignement des PLP.

Action & Démocratie assume pleinement la défense des professeurs de l’enseignement professionnel et de leur statut. Produit d’une scission avec la Snetaa-FO dont la direction avait finalement signé le passage au bac pro 3 ans, Action & Démocratie est à l’origine un syndicat de PLP. Contrairement à certaines organisations qui tendent à s’en désintéresser au vu de la réduction des effectifs du corps des PLP, Action & Démocratie reste profondément attaché à la défense de l’enseignement professionnel. Si le syndicat s’est depuis ouvert aux autres corps de l’enseignement, ce n’est pas dans l’idée de le délaisser mais au contraire de pouvoir mieux peser dans les instances pour le défendre plus efficacement.

Spécificité du professeur de lycée pro

Socialement défavorisés, accumulant les difficultés scolaires et percevant (hélas trop souvent) leur orientation comme une « sanction », les élèves de LP manifestent régulièrement un rejet profond de l’institution. Une situation qui oblige leurs enseignants à tenter par tous les moyens de les réconcilier avec le monde éducatif et plus largement avec celui de la Culture. Des enseignants qui ont aussi pour mission de permettre l’insertion professionnelle à leurs élèves après le CAP ou le Bac pro mais aussi de plus en plus de leur permettre de poursuivre dans les meilleures conditions un BTS ou une licence professionnelle. Plus encore que les certifiés, les enseignants en LP ont donc la lourde tâche de devoir jongler entre éducation, orientation, (re)motivation et transmission des savoirs. Pour répondre à ces multiples demandes, ils doivent mettre en œuvre des pédagogies innovantes autour de projets pour donner sens à leur enseignement en particulier dans les matières professionnelles. Cette transmission des connaissances qui fait une large place à la démarche inductive est guidée par l’objectif de faire acquérir à nos élèves les gestes et techniques professionnels, les PMFP devant leur permettre de consolider les acquis. Si l’apprentissage en entreprise peut être une solution pour certains élèves, il ne peut être la solution pour l’ensemble des élèves de LP qui ont besoin de temps pour acquérir les connaissances, de périodes de remédiation où l’erreur est permise, où la variation des situations d’enseignement va leur permettre de consolider les compétences acquises au cours de leur formation. La formation professionnelle sous statut scolaire est un atout et il est urgent de renouer avec l’ambition qui a accompagné sa création.

Action & Démocratie réclame en conséquence la préservation du concours national de CAPLP qui assure, par le principe républicain de l’anonymat, un enseignement de qualité équitablement réparti sur l’ensemble du territoire national. Action & Démocratie demande un réajustement de la grille indiciaire des PLP pour prendre en compte les différentes missions du professeur des LP qui dépassent largement le cadre de l’enseignement disciplinaire. A cette condition, le Pacte n’aura plus lieu d’être, chaque PLP remplissant déjà dans une large mesure les différentes missions prévues par celui-ci (cf. rémunération).

Faciliter l’intégration des contractuels et néo-titulaires

En cohérence avec le principe selon lequel le concours du CAPLP est la voie prioritaire d’accès au corps des professeurs du LP, il faut faciliter la préparation de celui-ci pour les agents en exercice (si les contractuels ont leur place au sein des LP, ils ne doivent pas y devenir la norme), qu’il s’agisse du CAPLP externe ou interne, car la préparation de ce concours participe à l’effort de formation qu’il faut encourager. Or les contractuels en exercice ne disposent actuellement pas du congé de formation pour pouvoir préparer dans de bonnes conditions le concours du CAPLP. Outre l’incidence financière (prendre un mi-temps pour le préparer en interne par exemple), ce congé n’est pas un droit. C’est pourquoi Action & Démocratie réclame que les contractuels préparant le concours (interne ou externe) puissent opter pour une décharge de service de 2 à 4 heures d’enseignement renouvelable une fois. Compte tenu du coût déjà élevé, et exorbitant au regard de son efficacité, de la formation des professeurs (le PLF 2024 y consacre près de 800 millions pour un résultat des plus discutables), le fléchage d’une partie de ce budget pour inciter les contractuels à préparer le CAPLP ne peut que contribuer à l’utilité et à l’efficacité de cette dépense, quitte à l’augmenter légèrement ce faisant.

Une fois son concours validé, le professeur de LP le deviendra de plein droit. Il est en effet indispensable que les enseignants ayant réussi le concours ne soient plus des « professeurs stagiaires » mais des « professeurs en stage ». Rappelons d’ailleurs qu’avant 1989, c’était le cas puisque les professeurs étaient titularisés dès la réussite au concours. Action & Démocratie réclame en conséquence le rétablissement de la titularisation immédiate non seulement pour les professeurs du LP mais aussi pour les lauréats de tous les autres concours de recrutement d’enseignants ainsi que la suppression du statut de « professeur stagiaire » qui est en réalité une contradiction dans les termes. Parallèlement, et comme nous le proposons aussi pour tous les enseignants, nous défendons le principe du pré-recrutement impliquant une période d’immersion professionnelle rémunérée dans l’année ou les années qui précédent le concours, cela afin d’acquérir une première expérience professionnelle qui sera validée quoiqu’il arrive par la suite, et ainsi bénéficier de la formation pédagogique la plus adaptée et la plus efficace qui soit, celle de terrain, étant entendu qu’en matière de pédagogie, la formation d’un professeur est pour ainsi dire permanente, le métier s’apprenant au fil du temps et par la pratique (cf. notre position sur le recrutement et la formation des professeurs).

Formation et reconversion du professeur de LP

Du fait de la spécificité de son métier, le professeur en LP est confronté à une usure professionnelle souvent plus forte que ses homologues certifiés. C’est pourquoi Action & Démocratie est favorable à l’évolution de carrière des enseignants du LP. Que ce soit pour passer un concours interne ou externe dans l’enseignement (CAPES, Agrégation…) ou pour se réorienter dans un autre corps de la fonction publique, l’enseignant du LP devrait avoir, de droit tous les 10 ans, un congé de formation d’une année (renouvelable une fois) afin de lui permettre, s’il en ressent le besoin, de faire évoluer sa carrière.

L’expertise du professeur de LP doit être non seulement respectée mais aussi utilisée. Action & Démocratie propose ainsi qu’à partir de 50 ans, pour les enseignants de LP, comme d’ailleurs pour tous les personnels enseignants dont l’usure professionnelle n’est actuellement pas prise en compte, soit intégré (s’il le souhaite) à leurs obligations de service un temps d’accompagnement des professeurs débutants afin de transmettre leur expérience professionnelle aux jeunes enseignants (y compris contractuels). Ce travail de tutorat et d’accompagnement se traduira par une diminution des heures d’enseignement dans ces mêmes obligations de service (cf. notre proposition sur la création d’un statut de professeur senior).

La formation est un droit mais aussi une nécessité tout au long de la carrière d’un enseignant de LP. Comment un professionnel peut-il former un élève à des techniques qu’il n’a pas lui-même pu appréhender, encore moins maîtriser lors de son expérience professionnelle ? Action & Démocratie réclame que tous les 10 ans, si l’enseignant en ressent le besoin, il puisse bénéficier soit par l’intermédiaire d’un congé, soit d’une décharge de service de 2 à 4 heures d’enseignement d’une formation lui permettant de réactualiser ses connaissances professionnelles. Ce droit ne concernerait bien évidemment pas que les enseignements professionnels, certains enseignements généraux nécessitant tout autant une réactualisation des connaissances.

Pouvant « également exercer dans les classes ou divisions conduisant à l’obtention de brevets de technicien supérieur et dans les formations conduisant à l’obtention de licences professionnelles quand celles-ci sont organisées par convention avec les établissements scolaires », l’obtention de ces formations pourrait permettre le cas échéant aux enseignants de LP d’être prioritaires dans les attributions de postes dans l’établissement de formation aux BTS. 

Une juste rémunération des PLP

Respecter l’expertise du professeur en LP, cela consiste à lui faire faire ce pour quoi il a été recruté et non autre chose. Il va de soi que les professeurs en LP doivent exercer les missions que prévoit leur statut, où il est clairement exposé qu’ils « participent aux actions d’éducation, principalement en assurant un service d’enseignement […] Dans ce cadre, ils assurent le suivi individuel et l’évaluation des élèves et contribuent à les conseiller dans le choix de leur projet d’orientation. ». Toute autre activité que l’enseignement doit rester secondaire dans son service et ne saurait en aucune façon lui être imposée, qu’il s’agisse d’accompagner des élèves en sortie ou de participer à des réunions à l’utilité douteuse. Action & Démocratie est régulièrement amené à le rappeler, y compris à des personnels d’inspection qui ont tendance à confondre la fonction du professeur avec le rôle d’un animateur.

Concernant la rémunération, Action & Démocratie ne fait pas du « dégel » du point d’indice l’alpha et l’oméga de ses revendications même si nous défendons évidemment, avec la fédération des services publics de la CFE-CGC dont nous faisons partie, l’indexation du point d’indice sur l’inflation, mesure qui concerne cependant toute la fonction publique et qui est loin de suffire à enrayer le déclassement des enseignants. Répétons-le, ces derniers ont été les grands perdants de toutes les mesures prises jusqu’à présent au titre de la « revalorisation », ce pour quoi Action & Démocratie réclame aussi et en priorité non pas une augmentation de la valeur du point d’indice (« dégel ») mais une augmentation du nombre de points d’indice en % et non de manière uniforme afin de respecter les écarts entre les différents IM (en effet, une augmentation uniforme du nombre de points d’indice, comme celle dérisoire de 5 points au 1er janvier 2024, n’entraîne pas une augmentation uniforme en % puisqu’aux indices plus élevés, elle est moindre qu’aux indices plus faibles).

C’est aussi la raison pour laquelle il faut répartir de manière plus équitable les augmentations qui n’ont concerné jusqu’à présent que les débuts de carrière, à l’instar de la prime d’attractivité, dite « prime Grenelle », dont la concentration sur les indices 1 à 6 essentiellement a pour effet pervers le ralentissement de la progression salariale (tout en conservant habilement la progression indiciaire puisqu’il s’agit d’une prime). Voilà pourquoi Action & Démocratie réclame une refonte de la grille indiciaire des professeurs pour la rapprocher de celle des autres cadres de la fonction publique tant au niveau du rythme d’avancement qu’à celui des indices, notamment terminaux, de chaque grade. Action & Démocratie réclame également, et comme pour tous les autres enseignants, le paiement des heures supplémentaires à leur juste prix (c’est-à-dire avec une majoration reposant sur un principe analogue, sinon identique, à celui qui régit la rémunération des heures supplémentaires dans le droit commun, où cette majoration va de 25% à 50%), ainsi que leur indexation sur le grade et l’échelon (contrairement au mode de calcul totalement arbitraire qui est actuellement en vigueur et aboutit, contre tout bon sens, toute logique et toute décence, à une minoration des heures supplémentaires dans la majorité des cas : cf. notre analyse sur l’arnaque des heures supplémentaires).

Sommaire

  • Accueil page PLP
  • Edito
  • Le statut et les missions du professeur de LP
  • La rémunération
  • La carrière
  • L’entrée dans le métier
  • La mobilité géographique
  • Le pacte enseignant
  • L’indemnité de résidence
  • L’indemnité de suivi et d’orientation
  • Les heures supplémentaires
  • Congés d’invalidité temporaire imputable au service et accidents de travail
  • La protection fonctionnelle
  • Les temps partiels
  • Le congé de formation
  • Le congé de maladie
  • Le congé longue maladie
  • Le congé longue durée
  • La disponibilité
  • Les remplacements
  • Les aides sociales
  • Le télétravail
  • La prime d’équipement informatique
  • La disponibilité
  • Le détachement
  • La retraite progressive
  • La rupture conventionnelle
  • La retraite
  • La procédure disciplinaire
  • L’obligation de réserve