Echec de la grève du 26 janvier : il est temps de passer à autre chose !
communiqué Action et démocratie -28 janvier 2021
88% d’enseignants non-grévistes le mardi 26 janvier, des cortèges clairsemés, quelques vagues allusions à « la gronde des enseignants » dans les médias : le scénario était écrit à l’avance et l’échec prévisible en dépit des incantations largement médiatisées d’un syndicat qui ne craignait pas de prédire « deux enseignants sur trois » en grève dans le premier degré !
Action & Démocratie a pris ses responsabilités en refusant de s’associer à un mouvement de protestation mal préparé, à l’appel d’une intersyndicale réunissant, autour de la FSU, le SNALC, SUD, FO, la CGT et le SNCL. Tous les ingrédients pour en faire un coup d’épée dans l’eau et une gesticulation sans conséquence étaient en effet réunis, à commencer par une date mal choisie, des revendications trop vagues et aucune stratégie préalable au sein de laquelle une grève aurait pu avoir un sens. Le seul résultat tangible de cette grève pour rien de mardi consiste à avoir fait économiser au Ministère une somme de l’ordre 15,95 millions euros. Pas de quoi faire perdre son sourire à Jean-Michel Blanquer, bien au contraire ! [Voir notre estimation du montant des économies faites par le MEN sur le dos des grévistes]
De notre côté, nous comprenons parfaitement les collègues qui, pour une grande majorité d’entre eux, ne se sentent pas concernés par ces grèves « fourre-tout » qui ne débouchent sur rien. Nous comprenons aussi qu’ils se sentent mal représentés par des organisations s’enferrant dans des postures purement politiques et qui, à coup de grèves sans lendemain, sont parvenues à user jusqu’à la corde le seul moyen que la profession possède pour se défendre. Nous comprenons enfin l’amertume des collègues qui ont malgré tout suivi cette grève sans trop y croire mais parce qu’ils éprouvaient le besoin de dire leur ras-le-bol. Les organisations qui les ont poussés à sacrifier un trentième de leur traitement pour rien pourraient leur faire des excuses !
Il est temps de passer à autre chose.
Action & Démocratie n’a pas appelé à la grève du 26 janvier et n’appellera pas davantage à participer à de semblables actions vouées à l’échec. Ce n’est pas parce que nous soutiendrions la politique menée par Jean-Michel Blanquer, qui poursuit avec application celle de ses prédécesseurs depuis trente ans en conduisant l’institution scolaire au bord du désastre. Tout au contraire, Action & Démocratie est le syndicat qui s’oppose de la façon la plus résolue, la plus étayée et la plus cohérente à cette politique : nos actions, propositions, vœux et amendements sont souvent les seuls à aller au cœur des sujets et pour cette raison, ils embarrassent les organisations qui se disent opposées à des réformes mais qui, au bout du compte, en partagent les principes et les motivations (1).
Pour nous, les choses sont claires et nous les écrivons noir sur blanc : tant que certains syndicats en quête de notoriété se contenteront d’apposer leur logo sur des appels mal rédigés pour des actions mal conçues, se bornant à suivre les décisions unilatérales d’un syndicat majoritaire qui n’en fait qu’à sa tête, personne ne pourra avancer ! Tant que sera décidée une journée de grève sans consultation préalable de la profession sur la stratégie, les buts et les modalités d’action, et qu’on se bornera à appeler les professeurs à des actions décidées sans eux par les états-majors parisiens de quelque organisation que ce soit, on n’avancera pas !
Pour Action & Démocratie, la grève est une chose sérieuse ; elle est une arme ultime qui doit être utilisée comme telle, c’est-à-dire avec prudence autant que fermeté. Les corporations qui obtiennent satisfaction sur des revendications légitimes sont aussi celles dont les syndicats usent du moyen de la grève avec intelligence et détermination, et non pas simplement « pour se faire entendre » ! Nous avons besoin d’avancer. Nous ne pouvons laisser la résignation et le désespoir l’emporter. Nous devons retrouver une capacité collective à peser sur les orientations de la politique éducative, et avant toute chose sur les orientations budgétaires. Les professeurs de France sont parmi les moins bien payés des pays de l’OCDE, ce qui est un scandale, mais, tant qu’ils n’organiseront pas de façon efficace leur défense, cette situation durera, tout comme les mesures purement cosmétiques destinées à la faire accepter. Or l’organisation de l’action collective est de la responsabilité des syndicats et constitue leur raison d’être.
Il est temps que tous les syndicats qui ont présenté des listes aux élections professionnelles se réunissent en un « Contre-Grenelle de l’éducation » et parviennent à s’accorder autour d’un nombre limité de revendications essentielles, urgentes et chiffrées qui devront être soumises à l’approbation de la profession tout entière. A cette condition, une intersyndicale de l’éducation aura force et légitimité pour exiger du ministre l’ouverture immédiate de négociations et sera en mesure de déposer un préavis de grève reconductible sérieux, à une période choisie pour contraindre le Gouvernement à l’écouter.
Finissons-en avec ces grèves d’un jour qui ont fait la preuve de leur inefficacité et qui en fin de compte décrédibilisent le combat syndical ! Prenons la lutte pour nos salaires et nos conditions de travail pour une chose sérieuse ! Cessons d’accompagner leur dégradation comme des tigres de papier !
Lire notre lettre à l’ensemble des organisations syndicales (PDF)
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