Retraite progressive : vrai ou faux cadeau ?

 Qu’est ce que la retraite progressive ?

 

La retraite progressive est un dispositif qui existe depuis longtemps pour les salariés du secteur privé et pour les contractuels du secteur public. Elle permet de travailler à temps partiel en percevant une partie de la pension de retraite. Depuis la réforme des retraites entrée en vigueur le 1er septembre 2023, ce dispositif est ouvert aux fonctionnaires.

Qui peut en bénéficier ? 

 

Tous les agents publics civils, qu’ils soient fonctionnaires ou contractuels, ont accès à la retraite progressive sous réserve de satisfaire à 3 conditions : 

1ère condition :  Être à 2 ans ou moins de 2 ans de l’âge légal de départ en retraite.

Année de naissance 

Âge de départ en retraite progressive

Avant le 1er septembre 1961 

60 ans 

Entre le 1er septembre 1961 et   le 31 décembre 1961 

 

1962 

60 ans et 6 mois

1963 

60 ans et 9 mois

1964 

61 ans 

1965 

61 ans et 3 mois

1966 

61 ans et 6 mois

1967 

61 ans et 9 mois

À partir du 1er janvier 1968 

62 ans 

2ème condition :  Disposer d’une durée d’assurance tous régimes d’au moins 150 trimestres.

3ème condition :  Exercer une ou plusieurs activités à temps partiel*. 

La somme de vos activités à temps partiel doit être comprise entre 50 % et 90 % de la durée légale. 

*Temps partiel : sauf lorsqu’il est de droit (par exemple, pour donner des soins à un conjoint, à  un enfant à charge ou à  un ascendant atteint  d’un  handicap nécessitant une tierce personne), l’employeur n’est pas tenu d’accorder le temps partiel demandé par l’agent remplissant les conditions. Il conserve son pouvoir d’appréciation  en  matière  d’autorisation  du  temps  partiel  compte  tenu  des nécessités de service.  Le temps partiel thérapeutique  n’ouvre pas droit à  la retraite progressive. 

 

Comment faire la demande de retraite progressive sans être à temps partiel au préalable ? 

 

Vous devez faire votre demande auprès du service des retraites de l’état (SRE) au moins 6 mois avant la date d’entrée en vigueur souhaitée. 

Parallèlement vous devez avoir l’autorisation de travailler à temps partiel, cette autorisation devra être faite au moins 4 moins avant la date d’effet. 

Nota : le silence gardé 2 mois après la demande vaut rejet de celle-ci en application de l’article L.231-4 du code des relations entre le public et l’administration. 

Il est conseillé à la personne qui souhaite bénéficier de la retraite progressive sans être encore à temps partiel de déposer en même temps sa demande de retraite progressive au SRE et sa demande de temps partiel au moins 6 mois avant. 

Comment est calculée la pension partielle perçue au cours de la retraite progressive ? 

Elle est calculée sur la base de la pension de retraite à laquelle le fonctionnaire aurait droit s’il cessait définitivement ses fonctions. 

Le montant obtenu est ensuite proratisé en fonction de la quotité de temps de travail non effectuée. 

Exemple : si un fonctionnaire travaille à 60 % (temps partiel) il percevra alors 60 % de son traitement (salaire). La quotité de temps de travail non effectuée étant de 40%, il percevra 40 % de la pension à laquelle il a droit au moment de la date d’effet de la retraite progressive. 

Quand la retraite progressive prend-elle fin ? 

Lorsque le fonctionnaire reprend une activité à temps plein. 

Lorsque le fonctionnaire demande son départ à la retraite. 

Le montant de la pension définitive est alors recalculé en prenant en compte les trimestres obtenus pendant la durée de la retraite progressive : les trimestres validés (4 par année) pour le calcul de la décote ou de la surcote ; les trimestres d’activité (variable en fonction de la quotité travaillée : par exemple, deux par an pour un temps de travail à 50%) pour le calcul du montant de la pension. 

 

Quelques exemples :

 

Madame Dubois a 62 ans et 164 trimestres. Elle obtiendra ses 172 trimestres à 64  ans  (taux  plein,  sans  décote,  ni  surcote).  Elle  décide  de  bénéficier  du dispositif de retraite progressive à temps partiel à 50 % à 62 ans. 

A 64 ans, elle aura 172 trimestres validés (4 par année de retraite progressive) et ne subira donc pas de décote, mais elle n’aura que 168 trimestres d’activité (2 par année de retraite progressive). Il lui manquera 4 trimestres pour obtenir un taux plein. De ce fait il lui faudra travailler jusqu’à 66 ans pour avoir ce taux plein. 

62 ans = 164 trimestres 

63 ans = 164 + 2 trimestres (activité à 50 %) = 166 trimestres  64 ans = 166 + 2 trimestres (activité à 50 %) = 168 trimestres  65 ans = 168 + 2 trimestres (activité à 50 %) = 170 trimestres  66 ans = 170 + 2 trimestres (activité à 50 %) = 172 trimestres 

 

 

Monsieur Dupond : 

Né après 1968, devenu enseignant dès l’âge de 23 ans, arrivé au 7ème échelon de la Hors Classe (indice 826 à compter du 1er janvier 2024) et qui souhaiterait partir en retraite à 65 ans :  

-> départ classique :

– comme tous ceux de sa génération, il devra avoir acquis 172 trimestres pour partir à taux plein (c’est-à-dire sans décote, ni surcote) 

– à 65 ans, il aura travaillé 42 ans, ce qui équivaut à 168 trimestres acquis s’il n’a pas eu de rupture dans sa carrière (disponibilité, par exemple…) 

– il subira donc une décote de 1,25% par trimestre manquant, soit 5% pour les 4 trimestres qui lui manquent 

– sa pension sera calculée en appliquant la formule suivante : traitement brut des 6 derniers mois x (168/172) x 0,75* x 0,95** 

* correspond au taux de remplacement qui est de 75% pour les fonctionnaires ** correspond à la prise en compte de la décote de 5% 

– le traitement brut à l’échelon 826 étant de 4.066 euros brut, la pension serait donc de 2.829 euros brut. 

 

-> Monsieur Dupond veut bénéficier de la retraite anticipée à 63 ans avec un départ à 65 ans : 

– si le temps partiel est de 50% (cas le plus classique), son salaire sera calculé ainsi : 50% de son traitement + 50% de sa pension théorique calculée à l’âge de 63 ans 

– 50% de son traitement = 4.066 / 2 = 2.033 euros brut

– pension théorique calculée à 63 ans, donc avec 160 trimestres cotisés … et donc 12 trimestres manquants (décote de 12 x 1,25% = 15%) 

– la formule de calcul est la même que précédemment, mais avec les paramètres suivants : traitement brut x (160/172) x 0,75 x 0,85 

– la pension théorique serait donc de 2.411 euros brut

– 50% de la pension théorique = 2411 / 2 = 1.206 euros brut

– salaire pendant les 2 années de retraite progressive : 2.033 euros + 1.206 euros = 3.239 euros brut … soit 79,7% du traitement initial 

 

Calcule de la pension définitive à 65 ans :

– le nombre de trimestres cotisés sera de 168, puisque chaque année à mi-temps comptera comme une année à temps plein (= 4 trimestres/an)  

– il manquera donc 4 trimestres pour partir à taux plein, comme dans le cas du départ classique, soit une décote de 5% 

– le nombre de trimestres de service sera lui de 164 (les 160 enregistrés à 63 ans
+ 4 trimestres pour les 2 ans de retraite progressive)  

– la formule pour calculer la pension définitive reste la même que dans les deux cas précédents, mais avec des paramètres en partie changés 

– pension = traitement brut x (164/172) x 0,75 x 0,95 = 2.762 euros brut

L’effet du recours à la retraite progressive est donc une baisse de la pension définitive de 67 euros/mois jusqu’au décès 

(67 euros brut /mois = 804 euros brut /an = 8040 euros brut sur 10 ans) 

 

Chaque cas est différent et il faudra bien calculer avant de se lancer dans la retraite progressive. 

Conclusion

La retraite progressive permet de travailler moins pendant la mise en place du dispositif en échange d’une diminution de la pension qui sera perçue jusqu’au décès. 

La seule solution pour échapper à cette diminution de la pension – en dehors de la surcotisation dont le coût financier est prohibitif – est de repousser l’âge de départ à la retraite afin de rattraper la durée de services perdue. 

Dans ce cas, la retraite progressive aboutit à travailler moins pendant un certain temps … mais à travailler pendant plus longtemps !! Où est le gain réel ???