Communiqué

PLF 2025 : un budget inacceptable

Tout en prétendant faire de l’éducation « une priorité », le Gouvernement n’hésite pas à supprimer à nouveau des postes d’enseignants en mettant encore en avant la baisse démographique. C’est l’inverse de ce qu’il faut faire ! Action & Démocratie exige de la cohérence et de la sincérité. A rebours de ce qui est fait, la baisse démographique doit être mise à profit pour diminuer les effectifs et limiter réglementairement le nombre d’élèves par classe, comme nous l’avons redit au conseil supérieur de l’éducation le 10 octobre.

Paris, le 11 octobre 2024 – Après avoir longuement préparé l’opinion à une cure d’austérité, le Gouvernement, en quête de 60Md€, a dévoilé le 10 octobre l’ampleur des coupes budgétaires dans les dépenses de l’État. L’Éducation nationale est concernée, avec un budget de 63Md€ qui, restant identique à celui de 2024, est par conséquent en baisse d’environ 1,1Md€ en euros constants (pour une inflation attendue à 1,8% en 2024).

Toujours aucune perspective en matière de revalorisation et des suppressions de postes inacceptables !

Le Gouvernement persiste à ne pas traiter l’une des causes principales de la crise que traverse l’éducation : en effet, le PLF ne prévoit absolument rien pour enrayer la crise de recrutement et la dévalorisation subie par une profession dont les traitements sont parmi les moins élevés en Europe. Pour obtenir à peine 0,1Md€ sur les 41,3Md€ de baisses de dépense recherchées, il n’hésite pas à faire payer à l’Éducation nationale le prix fort puisqu’elle fournit à elle seule 2000 des 2200 suppressions nettes de postes dans les ministères. L’ampleur des suppressions de poste est encore plus grande puisque, déduction faite des 2000 postes d’accompagnants (AESH) créés, ce sont 4000 équivalents temps plein (ETP) d’enseignants en moins, qui s’ajoutent aux 2500 ETP d’enseignants déjà supprimés en 2022 et aux 1500 supprimés en 2023 !

La plus grande partie de ces suppressions de postes a lieu dans le premier degré sous prétexte que le nombre d’élèves y baisse (Bercy n’hésitant pas à surestimer cette baisse comme il l’a fait en 2023 pour le PLF 2024). Le Gouvernement se paye même le luxe d’affirmer que le taux d’encadrement augmente malgré ces 4000 postes en moins car il aurait pu en supprimer 4800 ! Dans le détail, ce sont donc 3155 postes en moins dans le public et 660 dans le privé sous contrat pour le premier degré, 180 postes en moins dans le public et 40 dans le privé sous contrat pour le second degré.

Pour Action & Démocratie, les dépenses liées à l’éducation sont des dépenses d’investissement qui ne doivent pas servir de variables d’ajustement. La baisse du nombre d’élèves doit au contraire être mise à profit pour améliorer le taux d’encadrement, qui est l’un des moins bons d’Europe, et limiter réglementairement le nombre d’élèves par classe, en commençant par le premier degré où il est totalement aberrant d’avoir encore des classes comportant jusqu’à 30 élèves en maternelle et en élémentaire.

Pour imprimer le communiqué, cliquer sur l’image ci-dessous

 

Position d'Action & Démocratie

PLF 2025 : 4000 ETP en moins, c'est injustifié !

Un coût en postes exorbitant pour une économie budgétaire dérisoire

Après plusieurs semaines de préparation médiatique de l’opinion à une cure d’austérité sans précédent, le gouvernement de Michel Barnier a mis les cartes sur la table lors du conseil des ministres qui s’est tenu le 10 octobre : pour faire face à l’aggravation du déficit public estimé à 6,1 % du PIB en 2024 après 5,5 % en 2023, il a présenté un Projet de Loi de Finances (PLF) pour 2025 intitulé « une dépense maîtrisée, un effort juste, une France souveraine ». De beaux mots qui cachent la montagne de sacrifices à venir. Car c’est bien cette réalité qui se profile à l’horizon, avec un PLF 2025 qui envisage un effort de 60 milliards d’euros pour ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025 et à 3 % en 2029.

Pour y arriver, plus des deux tiers (68 %) de cette rigueur budgétaire proviendront de mesures de réduction des dépenses et un petit tiers (32 %) de hausses de recettes. Et naturellement, pour faire passer cette potion particulièrement amère, le Premier ministre a fait savoir que « tout le monde prendra sa part de l’effort ». Concrètement, cela signifie que les ministères vont être mis à la diète avec 21,5 milliards d’euros d’économies à réaliser, soit un tiers de l’effort total envisagé. L’Éducation nationale n’y échappera pas, avec un budget qui restera stable à 63 Md€ alors que l’inflation est attendue à 1,8 % en 2024 : en euros constants, les seuls qui vaillent, cela revient à une diminution de 1,1 Md€.

Pour Action & Démocratie, les dépenses liées à l’éducation, qui sont des dépenses d’investissement, ne peuvent pas servir de variable d’ajustement et s’il est un budget qu’il ne faut pas baisser, c’est bien celui-là car une telle baisse envoie le signal le plus désastreux qui soit, celui d’un pays sacrifiant sa jeunesse et ne croyant plus en son avenir.

De fait, le budget 2025 est en baisse en euros constants, et ne progresse pas par rapport à 2024, contrairement à ce que prétend le ministère qui se décarcasse pour prétendre qu’à « champ constant » (effectif d’élèves inchangé alors qu’il table sur une baisse) son budget est en hausse de 853M€. Et ce n’est pas le seul tour de passe-passe auquel il se livre pour donner à son budget une allure d’un budget digne d’une « priorité de la nation » qu’il n’a pas.

Une présentation insincère

Dans le document de présentation du PLF, le ministère met en avant des chiffres flatteurs concernant la dynamique de hausse du budget depuis 2017, dynamique qui se poursuivrait selon lui en 2025, ce qui est totalement mensonger. Certes le budget de l’EN, qui avait fortement augmenté en 2024 (de 3,9Md€, soit + 6,5%), avait également connu une croissance régulière durant ces dernières années : entre 2017 et 2024, il avait augmenté en tout de 14,2 Md€, soit une hausse de +29 % (avec une hausse plus significative entre 2022 et 2024, où il avait augmenté de 7,6 Md€, contre 6,7 Md€ entre 2017 et 2022). En incluant 2025 dans le chiffre flatteur de près d’un tiers de hausse du budget de l’EN depuis 2022, le ministère manipule donc grossièrement les chiffres pour dissimuler le fait que le budget 2025 met en réalité un coup de frein brutal à cette dynamique.

Mais il y a plus grave, car malgré 2000 postes d’accompagnants (AESH) supplémentaires qui permettent de maintenir le solde (si l’on peut dire) des suppressions nettes de poste à l’Éducation nationale à 2000 (sur un total de 2200 pour tous les ministères qui fait de l’EN le plus gros contributeur à la baisse des dépenses par réduction du personnel…), ce ne sont en réalité pas moins de 4035 postes d’enseignants qui devraient disparaître à la rentrée 2025. Après 2000 suppressions de postes en 2022, 1500 en 2023 et 2500 initialement envisagés en 2024, le PLF 2025 s’inscrit donc dans une même politique budgétaire consistant à supprimer des postes (essentiellement par des départs à la retraite non remplacés et plus marginalement des contrats non renouvelés) en prétextant une baisse démographique, et ce en toute bonne conscience car lesdites suppressions sont supposées se faire à dose infinitésimal au regard de l’effectif total, certains n’hésitant pas à prétendre que sur 1200000 agents, la suppression de 4000 postes représente « un trait de plume » qui ne se verra même pas !

C’est évidemment faux, et ce d’autant plus que, dans le détail, c’est le 1er degré qui sera le plus touché avec 3155 postes en moins dans le public et 660 dans le privé sous contrat. Le 2nd degré verra quant à lui 180 postes disparaître dans le public et 40 dans le privé sous contrat. Pour justifier cette nouvelle saignée, le Gouvernement ne met pas en avant le contexte budgétaire (l’apport des 2200 ETP en moins n’est que de 0,1Md€ sur les 41,3Md€ de dépenses en moins escomptés) mais la baisse de 97000 élèves attendue à la rentrée 2025. Pour en relativiser l’impact sur les effectifs totaux du ministère de l’éducation nationale, il rappelle que la poursuite de l’effort en faveur de l’école inclusive se traduira par le recrutement de 2000 AESH à la rentrée 2025. Et pour dissimuler les motivations purement comptables qui sont à l’origine de ces suppressions de postes en dépit de leur impact dérisoire, il affirme aussi qu’à champ constant – c’est-à-dire à effectif d’élèves inchangé – le budget du ministère augmente de 834 millions d’euros !

Des arguties pathétiques pour ne pas assumer la réalité, qui est pourtant très simple : malgré les belles déclarations d’Emmanuel Macron affirmant que « l’école est la mère des batailles », malgré les propos de Gabriel Attal lors de son entrée à Matignon claironnant que « l’école sera la priorité de son gouvernement » et malgré la demande appuyée de ce dernier à Michel Barnier lors du changement de gouvernement de « continuer à faire de l’école une priorité absolue », c’est le ministère de l’éducation nationale qui est le plus mis à contribution.

Les chiffres du PLF 2025 et les mots du Premier ministre le montrent clairement. Alors que les plafonds d’emplois envoyés aux différents ministères conduiront à une diminution de 2201 fonctionnaires en 2025, le ministère de l’Education nationale perdra donc à lui seul plus de 2000 emplois tandis que l’armée en gagnera 630 et la justice 619, et que ceux de l’Intérieur resteront stables. La concrétisation des propos de Michel Barnier qui a promis « des hausses substantielles pour renforcer le régalien et la sécurité des Français ».

En guise d’un « effort juste » pour reprendre les mots qui figurent dans le titre du PLF 2025, on a clairement fait mieux. Mais au moins, les choses sont maintenant claires : l’école n’est pas, malgré les belles paroles prononcées par les uns et les autres, la priorité de la nation. Tout juste un ministère qui coûte un « pognon de dingue » et qui peut servir de variable d’ajustement pour faire face aux besoins du moment. On s’en doutait depuis la suppression en début d’année de 700M€ de crédit. On en a maintenant la certitude.

Des suppressions de postes illégitimes et inacceptables

Pour Action & Démocratie, la partie du PLF 2025 qui concerne l’éducation nationale n’est pas acceptable. Certes, les effectifs d’élèves diminueront à la rentrée de 2025 : de 97000 d’après les prévisions, qui sont certainement opportunément gonflées si on en juge par celles de l’an dernier qui anticipaient 66900 élèves en moins dans le 1er degré alors que la baisse réelle n’a été que de 55488 élèves. Mais pourquoi faudrait-il, alors que les effectifs moyens par classe en France sont parmi les plus élevés d’Europe, réduire le nombre des enseignants ?

Depuis le rapport publié par la DEPP sur l’Europe de l’éducation, les chiffres sont connus et sans appel : dans le primaire, les classes françaises comptent en moyenne 22 élèves contre 19 en Europe ; dans les collèges, les effectifs grimpent à 26 élèves dans les classes françaises alors qu’ils atteignent tout juste 21 en Europe. Des moyennes qui d’ailleurs cachent d’importantes disparités puisqu’une classe de collège sur 10 dépasse les 30 élèves. Une situation qui est encore pire dans les lycées généraux et technologiques où 20% des classes ont plus de 35 élèves.

Action & Démocratie demande a contrario que la baisse à venir des effectifs d’élèves soit mise à profit pour diminuer le nombre d’élèves par classe afin d’arriver à la moyenne européenne. Si l’on veut réellement améliorer le niveau des élèves, c’est une mesure qui s’impose ! Et s’il faut pour le redressement du pays faire des économies sur certains aspects du budget de l’éducation, d’autres pistes peuvent être envisagées parmi lesquelles Action & Démocratie met en priorité la suppression du SNU, la réduction des aides phénoménales accordées à l’apprentissage et celle des généreuses primes perçues par les Recteurs, entre autres choses…

Prendre en compte le réel

On ne peut pas décidément pas s’en tenir à une approche purement comptable et établir un budget équilibré et utile en ne connaissant de la réalité que ce que des chiffres et des moyennes expriment. Si, toutes choses égales par ailleurs, il peut sembler légitime au gestionnaire de baisser le nombre de postes d’enseignants proportionnellement à la baisse du nombre d’élèves (dont nous avons dit qu’elle n’était en réalité qu’une estimation, mais passons…), et si le Gouvernement en est tellement persuadé qu’il croit faire un geste en ne supprimant que 4000 postes là où, prétend-il, les chiffres lui permettraient d’en supprimer 4800, la réalité de ces suppressions est tout autre sur le terrain ! Inutile de faire quelque procès d’intention que ce soit à qui que ce soit : le comptable croit sans doute sincèrement que son « trait de plume » aura un impact limité, voire inexistant, dans le réel, mais il n’en est rien : la baisse démographique n’est pas quelque chose de linéaire et ce n’est pas parce qu’on perd quelques élèves dans une classe qu’il faut supprimer la classe en question. D’un autre côté, cela fait une belle jambe au professeur des écoles qui a 30 élèves en maternelle de savoir qu’en moyenne il y a 22 élèves par classes en France. Et pour peu que, parmi ces 30 élèves, se trouvent un ou deux élèves notifiés et ingérables malgré la présence d’un AESH, les conditions deviennent vite impossibles, et c’est un immense gâchis pour tous, y compris un gâchis financier.

Voilà pourquoi Action & Démocratie réclame d’abord un changement radical dans l’appréhension du sujet et la gestion du taux d’encadrement. Nous demandons au ministère de fournir des données complètes, précises et exhaustives sur les effectifs réels, non des moyennes qui masquent les disparités et occultent le réel. Il est aberrant qu’il y ait encore des classes de 30 élèves en maternelle ou en primaire, et n’y en eut-il qu’une, ce serait une de trop. La baisse attendue de la démographie doit permettre non seulement d’initier un processus permettant de ramener l’effectif par classe dans la moyenne européenne (au moins), mais aussi d’agir résolument et utilement pour introduire dans la réglementation une norme en la matière qui fait encore cruellement défaut, défaut qui rend possibles les disparités et les situations aberrantes que l’on constate sur le terrain. Action & Démocratie demande donc que soit défini un effectif maximal, dans le premier degré pour commencer, fixé à 22 en maternelle et 24 en primaire (et diminué à proportion du nombre de niveaux par classe). Cela ne coûtera pas plus cher et sera même probablement rentable à moyen et long terme.

Fort du vœu que le Conseil de l’éducation a adopté le 6 juin 2024 à l’initiative d’Action & Démocratie, une proposition de loi en ce sens sera envoyée à tous les groupes parlementaires afin que chacun prenne ses responsabilités sur un sujet qui, pour ceux du terrain, est essentiel, voire vital.

Vous êtes intéressé par la démarche d’Action & Démocratie envers les parlementaires ? N’hésitez pas à nous contacter pour obtenir une lettre-type à adresser à votre député.