Pour une réouverture véritable, en septembre (cliquez pour lire la déclaration)…

 

À tous les niveaux de la hiérarchie, des personnels de l’Éducation Nationale ou des membres de leurs familles sont directement affectés par le « Covid19 » et, avant toute chose, nous leur adressons notre sympathie.

Action & Démocratie dresse un premier bilan de la situation

Tout comme l’ensemble de la population, les personnels de l’EN ont eu à encaisser le choc de ces mesures, et ils encaissent comme tout le monde les chocs à répétition des nouvelles terribles qui tombent quotidiennement. Sur un plan humain, la déstabilisation des personnels a été massive et nombre de collègues doutent que quiconque s’en soit soucié. Sur le plan strictement professionnel, conscients de leurs responsabilités vis-à-vis des élèves qui leur sont confiés, les professeurs ont immédiatement été sur le pont pour tenter d’assurer la « continuité pédagogique ».

D’UN POINT DE VUE TECHNIQUE

– Des problèmes critiques d’accès aux réseaux informatiques ont été constatés lors des premières tentatives de connexion aux plateformes permettant d’entrer en contact avec les élèves et leurs familles. Ces plateformes ont été saturées.

Dans les premiers jours, il a fallu passer beaucoup de temps pour simplement rétablir un contact avec les élèves. Certains élèves à ce jour restent injoignables autrement que par téléphone. Les élèves et leurs familles ne parvenaient pas à se connecter.

La saturation par les connexions sur les plateformes (ENT, Pronote…) et leur sous-dimensionnement ont été deux évidences.

– Face à cette situation, certaines équipes de direction ont demandé à leurs enseignants de réduire la dose de travail qu’ils tentaient de transmettre aux élèves par voie informatique pour faciliter la mise en route de la continuité pédagogique.

Une amélioration nette de la situation a été constatée à partir du jeudi 19 mars sur l’ENT.

Si les problèmes de connexion persistent, une normalisation fragile de la situation semble s’établir à partir de la semaine du 23 au 27 mars.

Environ 75% des effectifs des classes parviennent à être contactés dans le cadre de la continuité pédagogique.

– Les situations sont très variées : certains collègues axent leurs interventions autour de la mise en place de révisions dans un premier temps, d’autres proposent cours, devoirs et notations, d’autres refusent de surcharger psychologiquement les élèves et leurs familles en procédant à des évaluations, les familles se plaignent de ne pas avoir le retour des notes des E3C… Des doses importantes d’angoisse et d’énervement sont à noter.

Le problème majeur et sans solution actuelle est que certains élèves ne bénéficient plus d’aucun enseignement.

D’UN POINT DE VUE ÉTHIQUE

Des débats sont ouverts dans plusieurs établissements sur l’utilisation potentielle des plateformes informatiques qui, dévoyées, sont potentiellement des outils de surveillance et de contrôle de l’activité des professeurs.

Des inquiétudes sur ce risque sont clairement exprimées.

CONCERNANT LA CONTINUITÉ PÉDAGOGIQUE POUR LES COLLÈGUES AESH

Il s’agit de parvenir à motiver à distance un élève, quotidiennement, par les seuls moyens de communication des personnels.

Les courriels ne peuvent garantir le maintien d’un lien constructif.

Pour éviter la rupture du lien avec la scolarité, au préalable fragile, il y a donc nécessité d’entretenir un contact quotidien par messages textes, puis appels téléphoniques.

Les enseignants sont sollicités pour tenir informés les AESH du maintien du lien avec l’enseignement, ou de sa fragilisation.

Tous les collègues ne répondent pas, soit qu’ils soient dans l’incapacité de le faire, soit qu’ils n’aient plus de temps à consacrer à un cas isolé.

Cette continuité pédagogique à distance fragilise un peu plus les jeunes déjà en difficulté ou qui ont besoin d’un soutien plus personnalisé.

Les moyens techniques mis à disposition des collègues AESH sont insuffisants au mieux, mais souvent inexistants.

Il est demandé aux AESH de « maintenir un lien pédagogique rassurant avec l’élève et la famille » (cf. education.gouv.fr.) ce qui jusque-là ne leur était pas demandé dans le cadre de leur mission de service public.

L’accompagnement pédagogique des élèves les plus fragiles est très difficile lorsque les familles sont elles-mêmes en difficulté pour structurer la vie de leurs enfants ou comprendre les consignes.

Les missions des AESH étaient, avant la crise sanitaire actuelle, difficiles à remplir : elles le sont encore davantage, dans des proportions critiques.

LE REGROUPEMENT PÉDAGOGIQUE DES ÉLÈVES-ENFANTS DES PERSONNELS DE SANTÉ

La fonctionnalité des dispositifs mis en place reste à améliorer.

Les contingences matérielles posent de nombreux problèmes de logistique et d’incompatibilité des horaires de travail des soignants avec ceux de l’offre d’accueil.

Pour illustration, le cas d’une mère d’élève qui travaille dans un hôpital. Mère de trois enfants, devant assurer 10 heures de travail en horaires décalés, et placée dans l’impossibilité de déposer ses enfants lorsqu’elle commence sa journée de travail à 6h, ou de les prendre en charge lorsqu’elle finit à 20h.

LES RÉUNIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES

Dès le lundi 16 mars, à propos de la tenue des différentes instances dans les EPLE (conseils pédagogiques, conseils de classe, réunions diverses…), deux attitudes des équipes de direction ont existé :

1/ l’annulation pure et simple et sans délai des réunions initialement prévues en attendant d’y voir clair ;

2/ leur maintien temporaire avant annulation au constat de la gravité de l’évolution de la situation sanitaire.

Ce deuxième choix a causé suivant les établissements de 24 à 72 heures de discussions avant clarification et parfois des professeurs ont été l’objet de pressions très discutables de la part de certaines équipes de direction. Dans certains établissements, les équipes de direction ont clairement joué la carte de la confiance vis-à-vis des professeurs, reconnaissant de cette façon leurs compétences. Cela a été un pari gagnant : cette attitude a eu un effet très positif sur les équipes pédagogiques et a renforcé leur engagement. Beaucoup de collègues ont très vite trouvé des solutions innovantes pour pallier les difficultés des outils informatiques (ENT, pronote…)

Mais le problème du sous-équipement informatique des professeurs, des élèves et des familles reste important.

Des problèmes sont également liés à la multiplicité des médias informatiques et téléphoniques utilisés par les uns et les autres. Leur éventuelle incompatibilité a été un problème sévère éprouvé lors de cette première semaine.

Massivement, les collègues font état du temps inimaginable qui doit être consacré à l’enseignement à distance dans le cadre de la continuité pédagogique, et du peu de rendement de celui-ci.

LES ERREMENTS DE LA COMMUNICATION OFFICIELLE

La communication ministérielle a souvent été déstabilisante.

La délégation de responsabilité « à l’étage du dessous » tout au long de la chaine hiérarchique a été très fortement ressentie.

Elle a abouti logiquement à la mise en tension des chefs d’établissements et des professeurs dont certains se sont sentis surveillés (le mot « flicage » a souvent été utilisé), et méprisés en particulier après la désastreuse intervention de Madame la Porte-parole du gouvernement à propos de l’incident dit « des fraises ». Beaucoup de collègues ont été scandalisés, et restent humiliés malgré les prises de position positives effectuées plus tard par le Ministère et les Rectorats.

LA CONTINUITÉ PÉDAGOGIQUE

Les professeurs sont nombreux à avoir des enfants scolarisés et se trouvent ainsi « des deux côtés de l’écran ». Professeurs, ils sont bien placés pour connaître le travail supplémentaire à fournir pour établir et conserver le contact avec leurs élèves et parvenir à travailler avec eux ; mais ils constatent également les difficultés de leurs propres enfants à assister à des classes virtuelles d’un type ou d’un autre, et même plus simplement à recevoir des cours ou des exercices ou rendre du travail.

Les équipements informatiques font souvent défaut, ou sont en nombre insuffisant dans les foyers ; les réseaux de communication sont souvent affaiblis voire saturés comme le signalent régulièrement les opérateurs de télécommunications, ou n’existent pas dans les « zones blanches ».

Les moyens officiellement mis à disposition par l’Education Nationale (ENT, Pronote, le CNED avec la classe virtuelle) sont très fréquemment inaccessibles, ou fonctionnent mal, ou pas du tout. La « classe virtuelle » apparait comment étant la plus fonctionnelle. De surcroît, leur utilisation ne va pas d’elle-même, et de nombreux personnels, et a fortiori de nombreuses familles, ont des difficultés réelles à utiliser ces outils informatiques.

Les contacts téléphoniques directs avec les familles sont utilisés fréquemment mais sont très chronophages pour les professeurs qui ont alors à faire face à des doses d’angoisse et d’inquiétude tout à fait considérables et qui ne peuvent être négligées.

Ces problèmes techniques ont parfois été résolus par l’utilisation de plateformes alternatives (Discord, Zoom…) dont l’usage a été proscrit par les corps d’inspection dans une note de service transmise fin mars. Cela met en difficulté les collègues qui avaient établi le contact avec leurs classes de cette façon-là. Bien entendu, ils ne peuvent accueillir une telle interdiction de façon positive.

Le constat du sous-dimensionnement des réseaux informatiques et de leurs pannes était antérieur à la crise actuelle ; il n’en est que plus visible à présent.

Globalement, ce qui est constaté et pressenti est que la continuité pédagogique n’est pas, et ne pourra pas être une réalité équivalente pour tous. Ce fait rompt l’égalité de traitement des élèves.

Cela aura des conséquences :

1/ les élèves en classes d’examens (3ème, 1ère et terminale) ne pourront pas tous correctement terminer leurs préparations.
 
2/ les élèves des autres niveaux ne pourront pas étudier correctement leurs programmes disciplinaires, ce qui leur posera un problème de niveau dans la classe supérieure, en particulier pour les spécialités choisies en 1ère par les élèves de seconde, et celles conservées en terminale pour les élèves de 1ère.

Si on constate que pour certains élèves la situation du travail autonome à distance est parfaitement assumée, pour d’autres elle est problématique. La continuité pédagogique ne pourra vraisemblablement pas être correctement assurée pour tous les élèves, quels que soit les efforts fournis par les personnels. Cette procédure d’urgence est tout à l’honneur de l’institution, de ses cadres et des enseignants qui se démènent pour l’appliquer, mais elle ne pourra vraisemblablement que limiter les dégâts pour la scolarité des élèves dans une mesure que nous espérons être la plus grande possible.

Action & Démocratie reste à votre écoute et vous invite à témoigner sur les difficultés ou les réussites qui sont les vôtres en cette période difficile pour nous tous. Il reste à souhaiter à chacun le courage et la force pour faire face, dans la durée, à cette situation inédite.

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