Madame la Ministre,
Dès votre arrivée rue de Grenelle le 24 septembre dernier, vous avez déclaré que « le navire ne changera pas de cap » et vous l’avez répété au début de ce mois d’octobre en ajoutant que ce que vous alliez changer, ce n’était pas le cap mais « la vitesse du navire ».
Garder le cap ? Mais de quel cap parle-t-on ? Jamais le métier d’enseignant n’a été aussi peu attractif, le niveau de la plupart des élèves français aussi bas et le climat au sein des établissements aussi dégradé.
Or, en dépit de nuances liées à la personnalité des ministres qui se sont succédés à l’éducation nationale et d’inflexions opérées sous la pression des évènements, c’est une même politique éducative qui est poursuivie depuis plusieurs années. Une politique marquée d’abord par une dramatique impuissance à enrayer le délitement l’école de la République et une incroyable désinvolture à l’égard des préoccupations les plus urgentes et parfois vitales des personnels.
Pour Action & Démocratie/CFE-CGC, il est urgent de ne pas aggraver le bilan objectivement désastreux de réformes qui font encore plus de mal que de bien sur le terrain.
A l’écoute des personnels dont nous nous efforçons toujours de porter la parole sans la travestir ou l’instrumentaliser au service d’une quelconque idéologie, Action & Démocratie/CFE-CGC ne défend que des mesures utiles, réalistes et souvent de simple bon sens, parmi lesquelles :
1) Mettre à profit la baisse démographique pour limiter les effectifs dans les classes et graver enfin cette limite dans le marbre de la loi. A ce sujet, quelles suites comptez-vous donner au vœu du conseil supérieur de l’éducation du 6 juin 2024 portant sur ce point ?
2) Faire respecter l’autorité des professeurs et des autres personnels de l’éducation, car c’est la base de tout à l’école. Or cela suppose également, et peut-être même premièrement, que l’administration respecte davantage ses agents dans tous ses actes de gestion et que leurs traitements soient réellement revalorisés car ils indiquent aussi le degré de considération que leur accorde l’֧État. Respecter l’autorité des enseignants implique aussi de ne pas insulter leurs compétences par des formations initiales et continues indigentes, et de ne pas détruire les concours de recrutement sous couvert de professionnalisation.
3) Mettre fin au démantèlement de l’enseignement professionnel sous statut scolaire qui vise à favoriser l’apprentissage et rebâtir entièrement la voie professionnelle pour en faire une voie choisie et non une voie de relégation, chose qui profiterait à l’ensemble du système scolaire.
4) Suspendre immédiatement la mise en œuvre de l’acte II de l’école inclusive et faire avant toute chose un bilan honnête de ce qui fonctionne mais aussi de ce qui ne fonctionne pas ou ne pourra jamais fonctionner si on continue ainsi.
5) Instaurer partout, et restaurer là où il le faut, un climat propice à l’étude en agissant en profondeur et avec constance afin d’enrayer la progression continue de la violence au sein des établissements scolaires, car il n’est plus possible de se contenter d’annonces sans lendemain, de vaines condamnations et d’indignations éphémères après chaque nouvel incident ou à l’issue de chaque nouveau drame.
A ces conditions et quelques autres que nous avons déjà exposées en détails dans nos précédentes déclarations et notre contribution à la mission consacrée à produire un « choc des savoirs », les personnels de l’éducation retrouveront confiance en leur ministre et la nation pourra de nouveau être fière de son école. Le chantier est colossal, mais on ne peut plus attendre ! Pour le mener à bien, il faut changer radicalement de cap, et tout de suite !