AD/CFE-CGC, pour défendre l'école et tous ceux qui la font vivre

AD / ACTUS /novembre 2025

Diffamations et accusations mensongères : la première cause de souffrance des personnels

Le nouveau Baromètre national 2024-2025 de l’Autonome de Solidarité Laïque (ASL) publié le 15 octobre 2025 est un véritable coup de tonnerre. Son contenu devrait interpeller non seulement le ministère mais aussi tous les acteurs, y compris l’ensemble des organisations syndicales. Action & Démocratie/CFE-CGC le prend pour sa part très au sérieux, d’autant plus qu’il confirme ce que nous constatons nous-mêmes et sur quoi nous alertons aussi depuis plusieurs années, à savoir une augmentation exponentielle des demandes d’aides et d’accompagnement de la part de personnels qui sont souvent choqués, et quelques fois désespérés, car deux fois victimes : victimes de l’agression (verbale ou physique) causée par un tiers et en même temps victimes de l’institution censée les protéger mais qui les abandonne – quand elle ne se retourne pas contre eux !

Avec plus de 12 000 dossiers ouverts cette année, soit une hausse de 12 % en un an et 23% sur cinq ans, l’ASL dresse à son tour un constat alarmant : « cette progression continue reflète une tendance lourde : les situations de tension et de conflit dans l’éducation ne sont plus conjoncturelles, mais structurelles. » Derrière ces chiffres et tous ceux que contient ce baromètre, c’est la souffrance réelle des personnels d’éducation que l’on perçoit — enseignants, AESH, CPE, directeurs d’écoles et chefs d’établissement — exposés à des violences, à des mises en cause injustifiées et à une judiciarisation croissante de leur quotidien.

Mais le fait le plus marquant de ce rapport, soulignée par l’association elle-même, c’est la progression spectaculaire des diffamations et dénonciations calomnieuses, désormais première cause de saisine de l’ASL.

La rumeur et la diffamation : une violence invisible, mais dévastatrice

Avec 3 657 dossiers recensés, soit près de 30 % des saisines, les accusations mensongères deviennent donc le premier motif de recours à l’ASL. Faux signalements, rumeurs amplifiées sur les réseaux sociaux, soupçons infondés d’agression ou d’attouchement : ces accusations brisent des carrières et détruisent des vies.

Leur progression (+176 % en cinq ans ) montre à quel point le phénomène est devenu structurel. Être accusé à tort, c’est voir sa parole mise en doute, son autorité contestée, et très souvent, son institution rester silencieuse, quand elle ne prend pas parfois ces accusations pour argent comptant, substituant à la présomption d’innocence dont bénéficie tout accusé par ailleurs une présomption de culpabilité dont la plupart des collègues qui nous contactent se plaignent à raison.

Beaucoup éprouvent un sentiment d’abandon profond, mêlé parfois de peur à l’égard de l’institution supposée les protéger. Pour Action & Démocratie, la diffamation et la calomnie sont aujourd’hui devenus un risque professionnel majeur qui doit être pris en compte comme tel par le ministère.

La protection fonctionnelle : un droit encore trop souvent nié

L’autre principal constat du rapport est tout aussi préoccupant : seulement 23 % des demandes de protection fonctionnelle sont acceptées. Un chiffre indigne d’un État employeur qui a pourtant l’obligation légale de protéger ses agents. Car, rappelons-le, si la protection fonctionnelle est un droit de l’agent, elle est avant tout un devoir de l’État. Et ce devoir, comme tout devoir, ne se discute pas.
Action & Démocratie dénonce depuis longtemps le non-respect de ce droit, pourtant garanti par le Code général de la fonction publique. Trop d’agents se heurtent encore à des refus injustifiés et non motivés, à des délais interminables ou à des interprétations restrictives de leur situation.

Nous portons depuis plusieurs années une exigence claire : la protection fonctionnelle doit devenir automatique et immédiate, chaque fois qu’un agent est diffamé, menacé ou agressé dans le cadre de ses missions. Rien ne saurait justifier qu’un enseignant, un AESH ou un directeur d’école doive se battre une seconde fois pour faire valoir un droit fondamental !

La dégradation continue du climat scolaire : des pratiques à faire évoluer en urgence

Le baromètre de l’ASL le montre : les violences verbales, la défiance des familles, la banalisation des mises en cause ou encore la multiplication des plaintes infondées ne sont plus des dérives isolées, localisées à certains établissements et certains territoires, mais les symptômes d’une crise systémique que les autorités ont laissé s’installer, quand elles ne l’ont pas alimentée en encourageant les « usagers » à adopter une attitude consumériste contraire à tout bon sens pédagogique…

Dans de nombreux cas, la hiérarchie de proximité joue toutefois encore son rôle, fort heureusement. Et, si besoin, une intervention syndicale opportune permet d’assainir à temps une situation avant que les tensions ne s’enkystent ou que la défiance s’installe d’un côté et de l’autre. Hélas, il arrive aussi, et de plus en plus souvent, que les personnels soient laissés seuls face à des situations complexes, sans soutien hiérarchique et avec un sentiment croissant d’insécurité juridique, fait unique dans la fonction publique en comparaison avec ce qui se passe dans d’autres administrations.

Nous ne devons pas laisser s’installer ces pratiques ! L’école ne retrouvera la sérénité que si l’État et ses représentants assument pleinement leur rôle d’employeur protecteur en garantissant à tous les agents une protection fonctionnelle de haut niveau et en veillant à son application uniforme dans toutes les académies. On ne devrait même pas avoir besoin de le réclamer, à vrai dire !

C’est pourquoi, comme nous l’avons fait en écrivant avec vous le livre noir qui lève le voile sur la face cachée de l’école inclusive, lequel sera remis au ministre ainsi qu’aux parlementaires afin que chacun soit informé du réel et prenne ses responsabilités, nous vous proposons d’écrire ensemble le livre noir de l’insécurité dans nos établissements.

Ne restons plus la majorité silencieuse !

Vous avez été accusé à tort, diffamé ou agressé et laissé sans protection par votre administration ?
Votre expérience compte.

Action & Démocratie lance donc un appel à témoignages pour documenter ces situations et obtenir des avancées concrètes sur la protection des personnels.

Écrivez-nous en toute confidentialité à : contact@actionetdemocratie.fr : votre témoignage sera publié en respectant vos indications et, bien entendu, en garantissant votre anonymat.

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