La DEPP (Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance) a publié en juillet 2025 une note d’information faisant le bilan d’une étude consacrée au vécu au travail des personnels du second degré en 2023-2024. Cette enquête nationale menée auprès de 35 000 répondants offre un panorama assez précis du climat scolaire, des conditions de travail et des atteintes subies par les personnels. Si tout n’est pas aussi sombre qu’une certaine littérature veut le dire, plusieurs données sont préoccupantes, pour ne pas dire alarmantes.
Un climat relationnel globalement apaisé… mais des disparités fortes
La grande majorité des personnels se sentent respectés par les élèves (93 %) et en sécurité à l’intérieur (92 %) comme aux abords (89 %) de leur établissement. La moitié des répondants considèrent même que la violence est absente ou marginale.
Cependant, les enseignants apparaissent moins positifs que les autres catégories de personnels : seuls 56 % estiment que « les élèves apprennent bien dans leur établissement », contre 71 à 79 % parmi les CPE, personnels de direction ou administratifs. En éducation prioritaire, les chiffres sont encore plus préoccupants : à peine un tiers des personnels jugent le climat d’apprentissage favorable…
Des conditions de travail dégradées
L’enquête révèle aussi une nette détérioration du ressenti sur les conditions de travail par rapport à 2019.
- Seuls 52 % déclarent disposer d’informations claires et suffisantes pour exercer leur métier (-15 points).
- 61 % ont le sentiment de faire partie d’une équipe (-13 points).
- À peine 40 % pensent pouvoir exercer le même métier jusqu’à la retraite (-7 points).
La rémunération demeure un point noir : seuls 22 % des personnels estiment être payés à leur juste valeur.
Les personnels de direction sont quant à eux confrontés à une charge de travail excessive et tirent la sonnette d’alarme en réalité depuis des années : seuls 28 % estiment disposer du temps nécessaire pour accomplir leurs missions. Les personnels administratifs et de vie scolaire portent un regard un peu plus positif sur leur charge de travail.
Des atteintes à la personne beaucoup trop fréquentes
C’est un sujet sur lequel Action & Démocratie est pleinement mobilisé. Plus d’un personnel sur deux (57 % très précisément) déclare avoir subi au moins une atteinte au cours de l’année scolaire. Les plus fréquentes sont : l’arrogance ou le mépris (42 %) et le refus ou la contestation d’enseignement ou d’exercice des missions (27 %).
Les moqueries, insultes, menaces, propos sexistes ou faits de harcèlement sont signalés dans des proportions moindres, mais restent préoccupants. Les atteintes physiques touchent quant à elles 4 % des répondants, ce qui, sur 35 000 répondants et toutes choses égales par ailleurs est énorme.
Les motifs de ces atteintes sont directement liées à la fonction : 38 % des atteintes sont liées au statut, à la fonction ou au corps d’appartenance, bien avant l’apparence, le sexe ou les convictions personnelles. On constate donc que, vu le nombre extrêmement réduit de mesures de protection fonctionnelle (cf. la lettre d’information juridique sur le bilan de la protection fonctionnelle en 2024 et notre analyse du bilan de la protection fonctionnelle en 2023 qui s’y applique également), l’administration continue à ne pas soutenir sur le terrain ses agents et que persiste un gouffre entre les déclarations ministérielles sur les plateaux et les comportements dans les rectorats.
A noter enfin que les personnels du secteur public, et plus encore ceux exerçant en éducation prioritaire, sont plus exposés aux atteintes que leurs homologues du privé sous contrat. Dans les collèges publics en EP, 65 % des répondants déclarent avoir subi au moins une atteinte, contre 46 % dans les collèges privés.
Ce qu’Action & Démocratie/CFE-CGC en retient
Cette enquête confirme une réalité que nous constatons quotidiennement et sur laquelle nous alertons depuis des années, notamment au conseil supérieur de l’éducation ou directement auprès de l’administration : si les personnels en général, et pas seulement ceux du second degré ici interrogés, restent attachés au sens de leur mission et trouvent une utilité sociale à leur travail, cela ne doit rien à notre employeur tant les conditions d’exercice se dégradent fortement, qui plus est de son fait ! Le manque de reconnaissance salariale, la charge de travail qui ne cesse d’être alourdie et la multiplication des atteintes reflétant un climat de violence installé ne sont pas des mantras agités par les syndicats mais des réalités qui fragilisent la profession et aboutissent à une crise d’attractivité sans précédent qui met l’avenir de l’école en péril.
Qu’attend donc le ministère pour tirer les leçons des études qu’il commande et publie lui-même ? Action & Démocratie a fait des propositions précises et réalistes pour enrayer cette évolution délétère, dont celles de l’automaticité de la protection fonctionnelle et d’un vrai suivi. Nous voulons un vrai service RH et non un échelon hiérarchique supplémentaire. Nous réclamons la suppression de tous les dispositifs qui entravent la liberté pédagogique et créé des tensions inutiles entre élèves, parents et professeurs comme le contrôle continu. Parallèlement, Action & Démocratie continuera à se tenir à vos côtés et à agir concrètement auprès des hiérarchies de proximité pour résoudre les situations difficiles et souvent scandaleuses dont vous êtes de plus en plus nombreux à nous saisir.